Ce documentaire est tourné dans la région de Naples dans le sud de l’Italie, à l’ombre du Vésuve qui fait régulièrement trembler la terre. Avec une très belle photo en noir et blanc, le réalisateur tisse le quotidien des habitants avec les réminiscences du passé.
POMPEI-SOTTO LE NUVOLE de Gianfranco Rosi. Italie, 2025, 1h50. Mostra de Venise 2025, grand prix du jury. Documentaire.
Critique de Magali Van Reeth, SIGNIS France
Les premières images du film montrent la danse des nuages, est-ce leur couleur qui a incité le réalisateur à ce choix du noir et blanc ? Ou peut-être est-ce la couleur d’un hiver pluvieux – il va beaucoup pleuvoir dans ce portrait de Naples, à l’encontre du cliché ensoleillée de l’Italie. A moins que ce ne soit la couleur des cendres de Pompéi, engloutissant pour l’éternité une ville et ses habitants.

Gianfranco Rossi choisit pourtant la vie, et les Napolitains d’aujourd’hui, sans le foot, la mafia ou les pizzas. On va croiser plusieurs personnages, une archéologue, un procureur chargé de traquer les pilleurs de tombes antiques, un libraire sans client mais avec beaucoup d’enfants qui envahissent sa boutique à la sortie de l’école. Et parce que la ville est un port, c’est aussi l’actualité brûlante, de la Syrie à l’Ukraine qui prennent place dans le film. Sans oublier un groupe de Japonais, loin des habituels touristes.
Le montage de Pompei – Sotto le nuvole est rythmé par les pompiers et surtout par les appels des habitants, inquiets d’une secousse, d’un départ de feu, d’une bagarre. Leur bienveillance fait chaud au cœur, y compris pour répondre à cet »habitué », homme inquiet de la fuite du temps dans cette région où on se cogne sans cesse au passé.
Dans la première partie du film, le spectateur se demande, à plusieurs reprises, ce qu’il voit. La réponse lui sera toujours donnée, un peu plus tard. Dans l’œuvre de Gianfranco Rosi, il faut accepter cette incertitude, ce défaut de perception qui avait été si bien mis en avant dans Fuocoammare (prix œcuménique Berlinale 2017). Le réalisateur nous convoque ainsi pleinement dans son documentaire, nous déstabilisant légèrement pour mieux nous faire participer à cette histoire. En pointant de judicieux parallèles entre hier et aujourd’hui, il nous permet de voir autre chose que ce à quoi on s’attendait.

Le choix du noir et blanc impose une douce mélancolie à Pompei – Sotto le nuvole, mais sans être la nostalgie d’un passé plus heureux, dans une région écrasée par sa réputation. Sous le regard bienveillant et curieux de la caméra, sous les nuages du Vésuve, dans le souvenir des cendres de Pompéi, la vie de quelques habitants de Naples nous est donnée dans une attachante clarté.
Magali Van Reeth

