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SEPT JOURS d’Ali Samadi Ahadi

Activiste emprisonnée en Iran depuis 6 ans, Maryam a obtenu 7 jours de permission. Elle doit retrouver sa famille exilée en Europe. Décidera t-elle de quitter définitivement le pays ? Un film tout en tension autour de l’engagement et de la résistance.

SEPT JOURS d’Ali Samadi Ahadi. Allemagne, 2025, 1h53. Avec Vishka Asayesh,Majid Bakhtiari, Tanaz Molae, Sam Vafa.

Critique de Magali Van Reeth, SIGNIS France

Le scénario du film est librement inspiré du destin de Narges Mohammadi, militante iranienne des droits des l’Homme et Prix Nobel de la paix en 2023. Il a été écrit par le réalisateur Mohammad Rasoulof, prix œcuménique au Festival de Cannes 2024 pour Les Graines du figuier sauvage.

Après des années de détention, la santé de Maryam exige une semaine de soins médicaux. Son frère en profite pour organiser clandestinement son départ et Behnam, son mari exilé en Allemagne, doit la retrouver près de la frontière turque, avec leurs deux enfants. Dena est une adolescente plutôt en colère contre l’absence de sa mère et Alborz, plus jeune, se réjouit de la connaître en vrai, et non plus à travers des écrans de téléphone.

En découvrant ces plans, organisés sans elle, Maryam est révoltée puis partagée entre le désir de revoir sa famille et celui de poursuivre son engagement militant. Fuir, c’est céder aux pressions d’un gouvernement qui fait tout pour éliminer les opposants. Mais c’est aussi la possibilité d’agir en dehors de l’Iran, en sécurité relative. Et de retrouver ses enfants qui grandissent sans elle. Rester, c’est se couper physiquement d’eux mais c’est assumer son combat et être fidèle à ceux qui souffrent de l’oppression au quotidien. Un choix émotionnel, politique, éthique et terriblement difficile à prendre pour cette mère de famille.

Ali Samadi Ahadi construit un film où la tension est constante. Pendant ces 7 jours où Maryam est libérée, chaque heure apporte son comptant de frayeur, chaque silhouette est un danger potentiel et la méfiance survient dans tous les moments de détente. La traversée de l’Iran pour rejoindre la Turquie suit le difficile passage de tous les clandestins : voitures dans la nuit, bus, regroupement de candidats à l’exil, et les montagnes enneigées surveillées par les armes. Une mise en scène efficace au service de son sujet.

Lorsque Maryam rejoint enfin les siens dans ce joli petit village kurde, la tension est encore là, cette fois parce que les retrouvailles sont forcément difficiles. On peut comprendre les hésitations d’un couple qui ne s’est pas vu depuis des années, les gestes maladroits et les faux-pas. Comme on comprend la révolte de l’adolescente, qui refuse de se laisser amadouer par cette femme qu’elle ne connaît. Entre eux, les enfants parlent en Allemand, ce que Maryam ressent comme une exclusion.

L’actrice iranienne Vishka Asayesh, présente dans presque tous les plans, donne beaucoup de puissance et de douceur à son personnage. Très juste pour exprimer les craintes d’une femme traquée et la douleur d’une mère qui sait que ses enfants lui échappent, elle est très émouvante dans ses colères. Notamment en soulignant qu’on est moins indulgent pour une femme que pour un homme lorsque l’engagement politique perturbe la vie de famille.

Filmé comme un thriller, Sept jours est bel hommage à tous ceux qui luttent, dans des conditions difficiles, et à ceux de leur entourage qui savent accepter leur choix.

Magali Van Reeth

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