MédiasLes Chroniques CinémaRIVERBOOM de Claude Baechtold

RIVERBOOM de Claude Baechtold

Au début des années 2000, trois jeunes gens qui se connaissaient à peine, s’embarquent pour un reportage dans un Afghanistan en guerre. Ce voyage, raconté avec un ton espiègle, les a profondément changé, soudé et a grand ouvert leur avenir sur d’autres horizons.

RIVERBOOM de Claude Baechtold. France, 2024, 1h35. Documentaire.

Critique de Magali Van Reeth, SIGNIS France

Lorsque l’armée américaine débarque en Afghanistan en 2002, un jeune journaliste et un photographe proposent à une de leurs vagues connaissances de se joindre à eux pour faire un état des lieux de ce pays en cours d’invasion. Ils sont Suisses tous les trois mais de caractères bien différents. Claude Baechtold, le réalisateur, est ce troisième homme, il n’a pas du tout l’âme d’un aventurier, ne connaît rien en politique étrangère et encore moins le maniement d’un appareil photo ou d’une caméra. Son regard neuf sur l’inconnu et le poids de son chagrin dont il ne peut se défaire vont donner à ce documentaire une saveur unique.

Partis faire le tour de l’Afghanistan, loin des grandes villes et de la présence de l’armée américaine, ils prennent des centaines de photos du quotidien, des vidéos de leurs disputes ou fou-rires, des scènes de rue, des jeux d’enfants. A la recherche de sensationnel, l’insouciance des trois compères, les paniques de Claude, les fâcheries de Paolo (le photographe) et le culot de Serge (un vrai journaliste quoique manquant d’expérience) les amènent parfois dans des situations périlleuses.

C’est dans un passage très dangereux, au bord d’une rivière en crue, éloigné de toute agglomération, que Claude va vivre un moment intense qui va le ramener dans l’instant présent, lui faire soudainement quitter les habits de deuil dont il ne pouvait se défaire. Lui donner la force de continuer ce voyage mais surtout, lui donner l’envie de vivre pleinement son avenir. A l’époque, il ne le réalise sans doute pas tout à fait.

Le voyage se termine, les photos non utilisées sont mises à l’abri et les cassettes vidéos bientôt perdues. Les trois jeunes gens sont devenus amis puis associés, la vie suit son cours pendant plusieurs années, jusqu’à ce que les cassettes vidéo réapparaissent. Pour Claude, il y a de quoi faire un film. Avec un montage astucieux entre vidéos et photos d’époque, il construit un journal intime de ses souvenirs et c’est alors que l’incident, au bord de la rivière Riverboom, va prendre tout son sens.

Peut-être fallait-il vraiment ces 20 ans de distance entre le voyage et la construction du film pour permettre au réalisateur de mieux cerner cette épiphanie et d’en comprendre toutes les répercussions. Le documentaire ainsi construit est un étonnant objet de cinéma, où l’image et le montage sont au centre de la mise en scène. C’est un voyage plein de vie et de frayeur vers le passé qui donne tout son sens au présent.

Magali Van Reeth

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